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My Mom Jayne : un film de Mariska Hargitay Gloire et paillettes, poussières d’archives

My Mom Jayne : un film de Mariska Hargitay


Gloire et paillettes, poussières d’archives


Si My Mom Jayne nous touche par son geste intime et introspectif, il nous laisse malgré tout de côté par sa forme superficielle et son égocentrisme débordant. Sur le papier, pourtant, tout est là pour nous séduire : un documentaire personnel, réalisé par une fille en quête de la mémoire de sa mère, star fauchée trop tôt, broyée par un système. Un retour aux archives, des images d’époque, une voix-off touchante. Un deuil, une mémoire, une recherche d’identité à travers la pellicule. Bref, du cinéma dans ce qu’il a de plus pur et personnel. Du moins… en théorie.


Car très vite, le film bascule. Ce qui aurait pu être un Aftersun hollywoodien se transforme en vitrine chromée du pathos américain. À peine a-t-on le temps de s’attacher à la figure de Jayne Mansfield, icône fragile des années 50, qu’on se retrouve submergé sous une avalanche de paillettes, de témoignages en larmes et de musiques libres de droits. Le film semble coincé entre hommage sincère et clip souvenir monté un dimanche après-midi sur iMovie. Effets de transition douteux, ralentis à foison, visuels saturés… 


Mais là où le bât blesse, c’est que derrière ce vernis clinquant se cache un vrai sujet. Un sujet profondément cinématographique, même : celui de la reconstruction d’une mémoire par les images. À travers la figure de Jayne, se rejoue l’histoire d’une époque où la pin-up était autant une icône qu’un produit. Femme fatale au service d’un regard masculin omnipotent, elle incarne la marchandisation du corps féminin par Hollywood, jusqu’à l’épuisement, jusqu’à la tragédie. Le film évoque cette chute, ce système impitoyable, mais le fait dans une forme qui semble l’illustrer plus qu’elle ne le critique.


Et c’est bien là tout le paradoxe du film : vouloir dénoncer les dérives du star-system tout en s’y adonnant corps et âme. Tout est dans le titre : My Mom Jayne : a film by Mariska Hargitay. Mariska s’offre le film, le produit, le brand. Elle ne se contente pas de raconter l’histoire de sa mère : elle la rejoue à son image, en devient la narratrice, la metteuse en scène, presque l’héroïne secondaire. L’hommage tourne à l’égo trip, gonflé aux larmes de crocodile et au botox.


Et c’est d’autant plus frustrant que, par moments, le film touche juste. Certaines images d’archives, certains plans fugaces, viennent nous heurter par leur authenticité. Un regard, un rire, une chute. Des bouts de vérité s’échappent parfois du montage, comme des étincelles dans le flot de sucre fondu. Mais ces instants sont vite recouverts par la voix larmoyante de Mariska, les témoignages d’amis millionnaires, les nappes musicales interchangeables.


En somme, My Mom Jayne est une œuvre qui aurait gagné à rester dans l’intime. Un film de deuil transformé en vitrine mémorielle surproduite. Une douleur sincère habillée comme une pub pour un spa de luxe. Ce n’est pas tant la sincérité du geste qu’on remet en cause ici, mais la forme choisie pour l’exprimer. Une forme qui, à force de vouloir trop dire, trop montrer, finit par nous éloigner de l’émotion. Comme si, pour pleurer Jayne, on avait cru bon d’illuminer le cercueil à coups de néons roses.


On ressort donc de ce visionnage un peu gêné, pas tant par le sujet que par son traitement. Et on se prend à rêver à un film plus sobre, plus discret, plus incarné. Un film qui, plutôt que de s’écouter parler, nous aurait vraiment permis d’écouter cette voix qu’on n’a jamais connue.

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